Pole-Ka est artiste et navigue entre Paris et Reims. Elle travaille sur de multiples projets mêlant différents domaines, tels que la sérigraphie, le fanzinat, le jeu, ou encore la musique. Elle a d’ailleurs créée l’univers visuel de plusieurs groupes musicaux.
Ses créations sont souvent très « chirurgicales » et s’inspirent des planches anatomiques, de la science, de la religion, des objets de curiosité et de la médecine.
Son univers atypique donne vie à des créatures hybrides, des personnages mutilées et à des objets tout aussi étranges les uns que les autres. Je vous invite à découvrir « son cabinet de curiosités » sur son site.

J’ai profité de cette rencontre pour en savoir plus sur sa relation avec le tarot, sur la conception et la création de son Tarot de Marseille, ses motivations et choix tant visuels que conceptuels et sa manière de créer.  C’est avec beaucoup de timidité et de gentillesse que Pole-Ka a répondu à mes interrogations.

Comment vous êtes-vous intéressée au Tarot ?
P.K. C’est un ami (marseillais) qui m’a fait découvrir l’existence du Tarot de Marseille. J’ai tout de suite été interpelée par sa richesse graphique et symbolique.

Quel aspect du tarot vous intéresse le plus ?
P.K. Au départ, j’étais surtout focalisée sur l’aspect visuel. Puis j’ai découvert un peu plus tard, lorsqu’on m’a tiré les cartes, que le tarot de Marseille pouvait être un formidable support de discussion, avant tout. Aujourd’hui je m’intéresse davantage à son histoire et sa dimension ésotérique.

Quel est votre arcane préféré et pourquoi ?
P.K. Sans trop de surprise et originalité, l’arcane du pendu ! Pour sa dualité, pour son aspect frappant, ses deux niveaux de lecture..

Comment avez-vous appris à utiliser le tarot ?
P.K. En lisant la notice ! 🙂
Je sais comment tirer les cartes si l’on s’arrête à l’aspect technique mais je ne me lancerai pas dans une interprétation car je ne pense pas avoir les qualités nécessaires pour le faire !

Le Tarot de Marseille par Pole-Ka

Comment a germée l’idée de créer un Tarot ?
P.K. C’est venu très vite après avoir découvert le Tarot de Marseille, presque comme une évidence tant il y avait de symboles à réinterpréter et avec lesquels s’amuser.
Je suis toujours attirée par ce qui comporte un aspect ludique, et puis il s’agit d’un bel objet.

Pourquoi avez-vous choisi de revisiter un jeu de tradition Tarot de Marseille ?
P.K. Etant tout à fait novice au moment de me lancer dans ce projet, je me suis simplement orientée vers la version la plus connue et la plus classique du Tarot.

Il vous a fallu 4 années de création pour nous offrir ce très beau tarot. Pouvez-vous nous conter les étapes de conception et de création pour mettre en oeuvre ce travail ?
P.K. J’ai commencé par dessiner les arcanes les plus évidentes pour moi, celles qui m’inspiraient le plus. Et puis le travail s’est un peu étalé dans le temps, car il y a eu d’autres projets qui se sont ajoutés, souvent plus « urgents » et chronophages. Mais je revenais régulièrement au tarot, par petites touches, en dessinant une carte par ci, une carte par là.
Au bout d’un certain temps, alors que j’approchais du « but », j’ai eu envie de recommencer les toutes premières cartes qui m’apparaissaient déjà comme « périmées », datées, par rapport à l’évolution de mon travail… Ça aurait été un cercle sans fin ! J’ai donc mis un dernier coup d’accélérateur afin de terminer ce projet sans revenir en arrière.

Quel medium et technique avez-vous utilisés pour créer ce tarot ?
P.K. Pour chaque carte il s’agit d’un dessin à l’encre de chine et à la mine de plomb, qui a été scanné puis colorisé. 

Quelles sont vos inspirations créatives ?
P.K. De manière générale, il y a plein de choses : des planches anatomiques, des gravures anciennes, la peinture de la renaissance, les enluminures du Moyen-âge, les cabinets de curiosités, l’histoire de la médecine…
Mais je peux aussi tout simplement trouver l’inspiration dans ce que je lis, ce que je vois, ce que j’écoute.

On reconnaît votre langage plastique et graphique dans chacune des lames, néanmoins vos créations sont parfois encore plus organiques, je dirais même viscérales. Même si certaines cartes sont assez «tranchantes», dans l’ensemble on y retrouve un peu plus de douceur dans le grotesque et le chirurgical. Pourquoi ce choix ?
P.K. Je ne crois pas qu’il s’agisse d’un choix; cela s’est imposé naturellement puisqu’il s’agissait d’un travail de réinterprétation. Je ne partais pas de zéro. Le fait de devoir composer avec l’imagerie pré-existante, tout en ayant pris beaucoup de libertés, a forcément orienté mon travail autrement que si j’avais simplement mis sur papier une vue de mon esprit.

Même si l’imagerie de toutes les lames a été réinterprétées, certaines sont empreintes de beaucoup plus de liberté créative, je pense particulièrement à certains personnages de Cour et à certaines Majeures comme Le Fou, Le Pendu, la Lune… que vouliez-vous communiquer au travers de ces partis-pris ?
P.K. Je pense que j’ai cherché inconsciemment à exagérer certaines caractéristiques des personnages liées aux arcanes, d’où la dimension grotesque de certaines cartes. Quand je m’attaque à un travail de réinterprétation comme celui-ci, j’aime m’approprier complètement les choses, quitte à m’éloigner des règles établies.
J’avais envie d’en faire quelque-chose de très personnel.

Dans l’ensemble, comment concevez-vous vos créations ? Etes vous d’abord sensible à un sujet, une imagerie ? Créez-vous de manière intuitive, privilégiez-vous en premier lieu le sensible puis ensuite l’intelligible ?
P.K. Ça se passe généralement de manière très intuitive. Ce peut être une idée liée à une thématique, ou une « image mentale », ou juste une sensation qui surgissent et je les couche sur papier. Et je ne verbalise pas du tout mes créations ensuite, ça ne m’intéresse pas de le faire et je préfère que chacun garde sa propre liberté d’interprétation !

Avez-vous des expositions à venir ou d’autres événements où l’on peut venir apprécier vos œuvres ? 
P.K. Il y en aura plusieurs : très prochainement je participe à une expo collective et caritative en faveur de la lutte contre le cancer du sein, qui aura lieu à Paris, à la galerie VivoEquidem.
Ensuite j’exposerai à Besançon en avril, avec une foule d’autres artistes qui ont tous travaillé sur le thème du papier.
Et il y aura d’autres événement qui suivront mais il est encore un peu tôt pour en parler !

Merci Pole-Ka pour cet entretien.

Art et Tarot – Portrait de l’artiste Pole-Ka

Art et Tarot – Portrait de l’artiste Pole-Ka – artiste dont l’univers est surprenant et parfois déroutant, j’ai souhaité en savoir plus sur cette créatrice et sur son tarot de Marseille qui se joue habilement du grotesque.